Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Birdie Num Num !
Archives
Derniers commentaires
14 avril 2009

Elections

Juste un mot pour dire qu'on est en pleine campagne électorale. Les premiers votes débutent dans les jours qui viennent et le tout va s'étaler à travers le pays jusqu'à mi-mai. C'est que ce n'est pas rien de faire voter - pour plus de 1000 partis - quelque 700 millions de personnes réparties sur plus de 3 millions de km2 dont une bonne moitié vit encore au village (les chiffres sont de tête, disons à la centaine de millions près). Particulièrement quand les menaces terroristes promettent d'endeuiller le processus. Il a fallu mobiliser deux millions de personnes pour gérer les 800 000 bureaux de vote, sans compter les six millions de policiers sur les dents. Du coup, le grand tournoi international de cricket, qui a traditionnellement lieu en Inde, a dû être délocalisé en... Afrique du sud. Impossible d'assurer la sécurité des deux événements en même temps (d'autant que l'équipe Sri Lankaise a été attaquée il n'y a pas plus d'un mois lors d'un déplacement au Pakistan).

imgad

Côté enjeux, on est pour l'instant dans la phase de détricotage des coalitions traditionnelles, où le Congrès actuellement au pouvoir voit lui filer entre les doigts la plupart de ses alliés régionaux ; le BJP (droite nationaliste hindou) durcit le ton ; et le "troisième front", qui regroupe tous les partis de gauche, fait planer toutes les incertitudes sur le résultat du vote. De là à imaginer un gouvernement du troisième front et une femme intouchable (on dit dalit, pour opprimé) premier ministre, tout est envisageable...

Publicité
Commentaires
E
La menace des intégristes hindous<br /> LE MONDE | 15.04.09 | 14h55<br /> <br /> MANGALORE, ETAT DU KARNATAKA (INDE) <br /> ENVOYÉ SPÉCIAL<br /> <br /> otre mission est de sauver les hindous." A écouter Vinay Shetty, l'Inde court un grand danger et il est bien temps de se lever pour la "sauver". Tilak (point rouge) peint au front, lunettes un brin sévères, le patriote glisse son stylo dans la pochette de sa kurta - tunique traditionnelle bleu pastel. Vinay Shetty est papetier. Il reçoit dans son bureau confiné dans un demi-sous-sol de sa boutique, lieu de passage qu'un commis ne cesse de traverser pour se réapprovisionner en cahiers et crayons. "Les chrétiens contrôlent de nombreux pays, les musulmans aussi, poursuit-il. Mais nous, les hindous, nous n'avons que l'Inde. C'est pour cela qu'il faut sauver les hindous."<br /> <br /> Il ne faut pas se fier à l'apparence policée du boutiquier. Vinay Shetty est un dur, un radical. Il dirige une organisation extrémiste hindoue, le Bajrang Dal, à Mangalore, localité située sur la côte du Karnataka léchée par la mer d'Oman. Depuis une bonne année, ce littoral luxuriant de l'Inde méridionale, tapissé de cocotiers, bananiers, manguiers et hibiscus, est la nouvelle terre de mission des prêcheurs de l'hindutva ("hindouité"). A intervalles réguliers, Mangalore et ses environs défraient la chronique d'une intolérance qui mine jusqu'aux fondements de l'Inde laïque et multiconfessionnelle qu'avaient théorisée ses pères fondateurs, Gandhi et Nehru.<br /> <br /> A partir de l'été 2008, les expéditions miliciennes du Bajrang Dal contre les églises chrétiennes, incendiées, mises à sac, se sont multipliées. Les intimidations contre les musulmans se sont elles aussi intensifiées. Des jeunes filles fréquentant le pub Amnesia de Mangalore ont été rossées, le 24 janvier, lors d'un raid de la "police morale" qui a provoqué un vif émoi national. L'agitateur ayant orchestré l'attaque de l'Amnesia, un certain Pramod Muthalik, enhardi par cette bienheureuse publicité, a poursuivi en menaçant de perturber la fête impie de la Saint-Valentin. A New Delhi, une ministre du gouvernement fédéral s'est déclarée effrayée par cette "talibanisation" de l'Inde. La formule a fait florès. "Talibans hindous" est la dernière injure du vocabulaire politique en Inde.<br /> <br /> Vinay Shetty est rodé à la controverse. Il a réponse à tout. Les attaques antichrétiennes ? "Il n'y a pas d'organisation derrière, justifie-t-il, c'est une explosion de colère populaire. Les gens sont très mécontents des conversions forcées auxquelles se livrent les chrétiens. Ils profitent de la misère de certaines basses castes pour les convertir en leur faisant miroiter des services gratuits d'éducation, de santé, de logement." Les intimidations visant les musulmans ? "Ils font de la provocation. Ils savent que la vache est sacrée pour les hindous. Mais ils se livrent délibérément à l'abattage des vaches pour nous offenser !" L'assaut contre le pub Amnesia ? Vinay Shetty y voit une fort "bonne cause". "Les pubs sont des lieux immoraux où garçons et filles boivent de l'alcool, fument et nouent des relations illicites, explique-t-il. Il faut les combattre pour sauver la culture indienne."<br /> <br /> Paroles de "taliban hindou"... Vinay Shetty déploie la vision paranoïaque d'un monde chargé de périls conspirant à miner l'identité hindoue par la ruse, le subterfuge, le vice. L'Inde n'échappe pas à une mutation observée dans d'autres pays de l'ex-tiers-monde : l'érosion des partis laïcs et "progressistes" qui ont présidé aux indépendances nationales a ouvert la voie à des mouvements prospérant sur des crispations identitaires et des raidissements religieux.<br /> <br /> Le Parti du Congrès de Gandhi-Nehru a été déstabilisé tout au long des années 1990 par la montée en puissance du Bharatiya Janata Party (BJP), le porte-drapeau d'un nationalisme hindou de plus en plus vindicatif. Ce dernier a finalement accédé au pouvoir à New Delhi en 1998 avant d'en être délogé en 2004 par une coalition dirigée par un Parti du Congrès requinqué après une période de disgrâce. Mais le BJP demeure en embuscade. Alors que l'Inde s'apprête à voter du 16 avril au 16 mai pour les élections législatives, le BJP et la galaxie du Sangh Parivar (la mouvance nationaliste hindoue) poursuivent sans relâche leur travail de sape idéologique.<br /> <br /> A Mangalore, le terreau est fertile depuis une bonne vingtaine d'années. C'est ici qu'a pris naissance, en Inde du Sud, la vague "safran" - couleur fétiche du nationalisme hindou. En mai 2008, ce mouvement a porté le BJP au pouvoir à Bangalore, la capitale de l'Etat du Karnataka, où se marient désormais high-tech et tridents de Shiva (les symboles religieux des nationalistes).<br /> <br /> Pourquoi ce littoral du Karnataka jadis plutôt pacifique, où chrétiens, hindous, musulmans cohabitaient sans conflits majeurs - au point qu'un syncrétisme islamo-hindou avait éclos - a-t-il basculé dans l'aigreur ? Selon l'universitaire Muzzafar Assadi, la réponse est à trouver dans la nouvelle "coalition sociale" qui a reconfiguré ces dernières années le monde hindou : les brahmanes, la caste supérieure qui anime en sous-main la mouvance "safran", ont su instrumentaliser le sentiment d'insécurité des castes subalternes face à la poussée économique des minorités chrétiennes (près de 10 % du district dont Mangalore est le chef-lieu) et musulmanes (20 %).<br /> <br /> Forts d'un système d'éducation de haut niveau, les chrétiens ont historiquement formé une élite locale. La percée des musulmans, elle, est plus récente : elle date de l'émigration vers les chantiers du golfe Arabo-Persique, source d'une généreuse manne de revenus. Leur ascension a multiplié les frictions avec les castes hindoues inférieures comme les billavas et les mogaveeras, pêcheurs qui vendent leurs poissons à des marchands musulmans. Cette plèbe hindoue fournit aujourd'hui les troupes de choc du nationalisme "safran".<br /> <br /> Les idéologues de l'hindutva en marche ne pouvaient donc rêver de meilleur laboratoire que ce littoral du Karnataka. Car c'est bien d'un laboratoire qu'il s'agit. On y éprouve des recettes politiques vouées à essaimer. Dans l'Inde du Nord, le BJP avait déjà érigé l'Etat du Gujerat en modèle hindouiste ; dans l'Inde du Sud, ce rôle revient au Karnataka, et en particulier à Mangalore. Rien n'est vraiment le fruit du hasard. L'expédition contre le pub Amnesia relève ainsi d'une stratégie visant à ghettoïser les communautés. Cette "police des moeurs" vise de manière prioritaire les jeunes filles hindoues, notamment celles coupables d'amitiés - fussent-elles les plus innocentes - avec des camarades musulmans.<br /> <br /> Entre le 1er août 2008 et le 15 février 2009, la presse locale a répertorié 45 incidents de ce type dans le district (1,5 million d'habitants). En général, les agressions ont lieu dans les bus, le seul espace social où se croisent vraiment les jeunes des deux communautés à la sortie de l'école. Il suffit qu'une jeune fille hindoue soit repérée en train d'afficher une amitié trop ostensible avec un jeune musulman pour que le châtiment s'abatte. Avertie par un mouchard - parfois par le chauffeur lui-même - au moyen d'un téléphone portable, une bande de nervis stoppe le bus à l'arrêt suivant, rosse les deux coupables avant de les traîner devant un commissariat de police.<br /> <br /> "Si l'on agit ainsi, justifie Vinay Shetty, dont les troupes sont impliquées dans ces attaques, c'est qu'on a bien identifié le jeu du musulman. Nos informateurs ont préalablement repéré sa stratégie de séduction. C'est un "love djihad" auxquels les musulmans sont bien entraînés. Ils ont de l'argent pour cela. Leur but est de séduire les filles hindoues afin de les convertir à l'islam après le mariage." Toujours cette théorie du complot, cette paranoïa de la "conversion". Le 11 février, Ashwami, une lycéenne de 16 ans, en est morte. Elle n'a pas supporté d'avoir été humiliée en public par les gros bras du Bajrang Dal en compagnie de Salim avec lequel elle discutait dans le bus. Elle s'est pendue.<br /> <br /> "C'est une situation assez effrayante", s'alarme B. V. Seetaram, directeur du journal Karavali Ale ("les vagues de la côte") dont les colonnes dénoncent ces brigades "safran". "Le risque est grand que cela débouche sur une guerre civile, ajoute-t-il. Combien de temps les musulmans et les chrétiens vont-ils encore rester silencieux ?" B. V. Seetaram est en permanence sur ses gardes. Une inquiétude qu'illustrent les murs hérissés de barbelés qui enserrent sa villa, située dans la zone industrielle de Mangalore. "Dès que quelqu'un sonne au portail, avoue-t-il, je crains qu'il s'agisse d'un policier."<br /> <br /> Le journaliste a déjà passé un mois sous les verrous en détention préventive, poursuivi sous divers prétextes (diffamation, chantage). "Ils montent des dossiers fallacieux contre moi", s'indigne-t-il en déplorant que la justice, la police et même la majorité des médias de Mangalore aient été "safranisés".<br /> <br /> Ses prises de position hostiles au Bajrang Dal lui ont valu des représailles musclées : imprimerie mise à sac, vendeurs tabassés. Mais ce qui l'attriste le plus, c'est l'attitude de ses coreligionnaires face à ces miliciens de l'hindutva qui se sentent encouragés par l'indifférence, voire la complicité, du public. "Nous sommes une petite minorité à nous dresser contre eux au nom des valeurs de la laïcité, dit-il. Mais la majorité des hindous reste passive devant ces extrémistes. On dirait qu'elle approuve leur police morale." Qu'importe : B. V. Seetaram continuera à "se battre" au nom d'une certaine idée de l'Inde.<br /> <br /> Frédéric Bobin<br /> Article paru dans l'édition du 16.04.09
E
De fastueuses dépenses de campagne à la rescousse de l'économie<br /> LE MONDE | 15.04.09 | 14h55<br /> NEW DELHI CORRESPONDANCE<br /> <br /> es élections sont une aubaine pour l'économie indienne. Le Centre d'étude des médias, basé à New Delhi, estime que près de 1,5 milliard d'euros seront dépensés en quarante-cinq jours de campagne électorale, soit davantage que le 1,4 milliard d'euros employés lors des dernières élections américaines. Quelque 20 % de ce "mini-plan de relance" seront consacrés aux dépenses courantes.<br /> <br /> Dans un pays aussi vaste que l'Inde, et doté d'un faible réseau routier, près de 70 hélicoptères sont loués, entre 3 000 et 3 500 euros de l'heure, pour transporter les candidats d'une circonscription à l'autre. Des 4×4 ont été réquisitionnés pour aller chercher les votes dans les districts les plus reculés. Des poètes sont recrutés pour imaginer des vers à la gloire du candidat et la vente de boissons, destinée à retenir ses partisans dans les meetings malgré le soleil de plomb, devrait augmenter de 15 %.<br /> <br /> Les budgets de communication d'espace publicitaire devraient avoisiner les 700 millions d'euros. Des statues, plus résistantes aux intempéries et au vandalisme que les affiches, ont été érigées ces derniers mois, parfois aux frais de l'Etat, comme dans l'Uttar Pradesh.<br /> <br /> Ainsi, 60 sculptures d'éléphant en granit, le symbole du Bahujan Samaj Party (BSP, parti des intouchables), au pouvoir dans cet Etat du nord de l'Inde, ont été commandées en taille réelle, sans oublier sa dirigeante, Mayawati, représentée avec son petit sac à main, en statue de bronze. La ministre en chef est même allée jusqu'à changer l'uniforme des policiers en bleu, couleur de son parti. "Les gens nous confondent avec des militants politiques", s'est plaint l'un des policiers à un journaliste local.<br /> <br /> La loi autorise chaque candidat à dépenser au maximum 42 000 euros lors de sa campagne, quelle que soit l'origine du financement. Bien souvent, l'argent sort de sa poche, car la politique est une affaire rentable en ces temps de crise. "Les candidats sont prêts à dépenser beaucoup, car ils sont persuadés de récupérer dix fois la mise une fois qu'ils sont élus, grâce à la corruption", estime Lenin, directeur du comité de vigilance sur les droits de l'homme, basé à Bénarès.<br /> <br /> ARGENT NOIR<br /> <br /> D'après une étude menée par l'ONG Liberty Institute, dans l'assemblée régionale du Karnataka, le nombre de crorepatis, députés dont le patrimoine dépasse les 160 000 euros, est passé de 131, juste après les élections de 2004, à 401 cette année.<br /> <br /> Le Centre d'étude des médias évalue à 500 millions de dollars l'argent noir, qui n'apparaît dans aucun livre de comptes de la campagne électorale. Dans l'Andhra Pradesh, un Etat de 80 millions d'habitants situé au sud de l'Inde, la police a dressé 450 barrages pour saisir les liasses de billets cachées dans les voitures.<br /> <br /> Dans les jours qui ont suivi la présentation des listes de candidats, fin mars, le quotidien Indian Express rapporte que près de 1,23 million d'euros ont été saisis. Les lingots d'or ou les billets étaient cachés sous les sièges, dans des sacs de riz ou encore dans des cargaisons de fruits.<br /> <br /> Cet argent noir est crucial pour acheter les votes des électeurs. Un procédé jugé plus efficace qu'une statue ou un spot publicitaire. La distribution de billets, même interdite, est si répandue que les politiciens en oublient la présence des caméras. Ils ont été douze à être pris en flagrant délit à la fin du mois de mars. L'un d'eux, le frère d'Abu Azmi, candidat du Samajwadi Party (SP, Parti socialiste) dans une circonscription de Bombay, a prétendu que l'argent avait été distribué pour "acheter des chips et de l'eau". La commission électorale indienne a ordonné une enquête.<br /> <br /> L'argent distribué aux électeurs menace-t-il leur liberté de vote ? Certains acceptent les billets distribués par les différents partis et continuent de voter pour le candidat de leur choix dans le secret de l'isoloir, lit-on dans le rapport réalisé par le Centre d'étude des médias.<br /> <br /> "Mais la distribution d'argent est la mère de la corruption, s'indigne Bhaskara Rao, son président, car l'électeur devra ensuite payer au candidat élu dix fois ce qu'il a reçu, pour avoir droit à des services de base."<br /> <br /> Julien Bouissou<br /> Article paru dans l'édition du 16.04.09
E
Les deux grands partis indiens menacés par des formations régionales<br /> <br /> LE MONDE | 15.04.09 | 14h54<br /> NEW DELHI CORRESPONDANT<br /> <br /> es boussoles sont brisées, les repères évanouis. Il n'est plus guère d'analystes patentés dans le Landerneau politique de New Delhi pour se hasarder à pronostiquer le résultat des élections législatives qui vont débuter, jeudi 16 avril, dans la "plus grande démocratie du monde". "Incertitude", "confusion", "éclatement" : à l'heure où 714 millions de citoyens sont invités à se rendre aux urnes au fil d'un cycle électoral qui s'étalera sur un mois - les résultats seront proclamés le 16 mai -, les commentaires se résignent à souligner l'imprévisibilité de ce nouveau chapitre de l'histoire politique indienne.<br /> <br /> Le paradoxe est grinçant. Alors que l'Inde a été touchée ces derniers mois par deux périls émanant de l'extérieur - la crise financière internationale et le terrorisme venu du Pakistan voisin -, la campagne électorale aura davantage été dominée par des enjeux locaux que nationaux.<br /> <br /> Les deux partis "nationaux", le Parti du Congrès, au pouvoir, et l'opposition nationaliste hindoue du Bharatiya Janata Party (BJP), auront bien tenté de réveiller une bipolarité conflictuelle, il n'est pas sûr qu'ils y soient parvenus. Chacun était dans son rôle. Le Parti du Congrès, qui fut la matrice de l'Inde indépendante sous l'égide du Mahatma Gandhi et de Jawaharlal Nehru, s'est présenté comme une garantie de stabilité. Revenu au pouvoir en 2004 après une longue éclipse, le Congrès était parvenu à un point d'équilibre entre la poursuite de la libéralisation de l'économie et la mise en place de programmes sociaux au profit des catégories les plus défavorisées.<br /> <br /> Vigoureusement critiqué par les milieux d'affaires, ce volet social du bilan du Congrès joue aujourd'hui un rôle d'amortisseur de crise, en particulier dans les campagnes.<br /> <br /> Mais c'est surtout sur le terrain de l'harmonie confessionnelle que le parti a tenté de faire valoir ses états de service. Veuve de l'ancien premier ministre Rajiv Gandhi (assassiné en 1991), Sonia Gandhi, la présidente du Congrès, n'aura eu de cesse de dénoncer la "politique de haine" du BJP, dont l'idéologie exaltant l'hindutva ("hindouité") a souvent pour effet d'attiser les conflits entre hindous (80,5 % de la population), musulmans (13,5 %) et chrétiens (2,3 %).<br /> <br /> Le candidat du BJP au poste de premier ministre, Lal Krishna Advani (81 ans), a répliqué sur un autre registre : la sécurité nationale. Il a accusé le Parti du Congrès de "faiblesse" dans la lutte antiterroriste, en particulier après l'assaut, fin novembre 2008, d'islamistes armés contre Bombay (174 tués). Mais il n'est pas allé au-delà. Il a bien pris soin de polir l'hindouisme intégriste, familier des imprécations antimusulmanes, dont est issu son parti.<br /> <br /> "Les classes moyennes sont en train de se détourner de l'idéologie de l'hindutva qui génère trop d'instabilité, analyse l'éditorialiste Prem Sankar Jha. Le sentiment monte qu'une telle voie pourrait finir par détruire le pays. Le BJP doit en tenir compte."<br /> <br /> La consigne est néanmoins difficile à imposer sous certains microclimats régionaux. Le BJP n'est que la vitrine politique "respectable" de la mouvance du Sangh Parivar, galaxie du nationalisme hindou dont les organisations militantes continuent de faire preuve d'agressivité sur le terrain. Dans des Etats comme l'Orissa (est) ou le Karnataka (sud-ouest), ces apologues de l'hindutva poursuivent leur harcèlement contre les musulmans et les chrétiens. "Les crispations identitaires fondées sur la religion ou sur la caste se sont émoussées au plan national, mais elles ont gagné en importance au niveau local", décrypte Pralay Kanungo, professeur à l'université Jawaharlal-Nehru (JNU) de New Delhi.<br /> <br /> Tel est le défi de ces élections. La régionalisation de la vie politique indienne, amorcée dans les années 1990, est en train de s'approfondir au point de déstabiliser les stratégies des états-majors nationaux.<br /> <br /> Le magazine Frontline y voit même un "changement de paradigme". Des formations régionales, dont beaucoup gravitent autour d'une personnalité charismatique, d'identités de caste (intouchables, basses castes...) ou linguistiques, se taillent des citadelles imprenables en Inde du Nord (Uttar Pradesh, Bihar, Orissa, Madhya Pradesh) ou en Inde méridionale (Andhra Pradesh, Tamil Nadu).<br /> <br /> La figure la plus emblématique de cette nouvelle génération de chefs locaux est incontestablement Kumari Mayawati, porte-étendard de la cause des intouchables, le groupe le plus défavorisé du système socio-religieux hindou. Mme Mayawati dirige aujourd'hui l'Etat de l'Uttar Pradesh et ne fait pas mystère de ses ambitions nationales.<br /> <br /> Dans d'autres régions, ce sont des représentants des castes intermédiaires, comme les Yadavs en Inde du Nord, qui s'imposent.<br /> <br /> "Cette éruption régionale de dirigeants annonce la montée de nombreuses petites Indes", s'inquiète l'hebdomadaire India Today. Une "troisième force" pourrait ainsi émerger de cette fragmentation du paysage politique indien. Saura-t-elle constituer une alternative crédible ?<br /> <br /> La plupart des commentateurs sont sceptiques. "Ce "troisième front" est un groupe amorphe composé de pachydermes régionaux qui pensent que leur heure pour diriger le pays est arrivée. L'Inde va entrer dans un "thriller" de mathématique électorale et de mégalomanie", écrit India Today. Mais à défaut de pouvoir régner à New Delhi, ces "satrapes", comme on appelle désormais ces nouveaux chefs régionaux, pourraient bien s'imposer comme faiseurs de roi.<br /> <br /> Frédéric Bobin<br /> Article paru dans l'édition du 16.04.09
Publicité
Birdie Num Num !
Newsletter
Publicité